Sunday, September 18, 2011

Câlins gratuits

Je sais pas trop pourquoi mais récemment je me suis remise à penser au mouvement des câlins gratuits.

Petit rappel : tout a commencé en 2004 avec un homme appelé Juan Mann, qui après un câlin spontané d'un inconnu à un soirée, a voulu lui-même donner des câlins spontanés à des inconnus dans la rue. Il s'est fait une pancarte avec inscrit : "Free Hugs" dessus, et s'est lancé à Sydney. Bon voilà, après il y a eu une couverture sur Youtube parce qu'il connaissait le chanteur du groupe Sick Puppies qui a intégré des vidéos des câlins gratuits dans un de ses clips
Puis ça s'est répandu un peu partout dans le monde.


J'en ai fait pas mal autour de mes 17-18 ans, en 2007-2008 donc. (Fiou, le coup de vieux déjà). Il y avait un forum sur internet facile à trouver, où les free huggeurs pouvaient proposer des heures et lieux de rendez-vous, et ils s'y retrouvaient ensuite tous avec des pancartes pour se balader dans la rue et distribuer des câlins le temps d'un après midi. J'y ai traîné un ami à moi parce que j'étais trop timide pour y aller seule, et au final on était tous les deux accro.
Le premier était entre le Trocadéro et la Tour Eiffel, à Paris. Beaucoup de touristes donc, et de gens non parisiens qui connaissaient les Free Hugs depuis internet ou leurs propres expériences. Je ne me souviens pas du premier câlin, mais j'avais adoré l'après midi, et j'en avais fait beaucoup, beaucoup d'autres. Je m'étais fait beaucoup d'amis dans le groupe de huggeurs, et on m'avait surnommée "Super Câlin", parce que même si j'étais timide dans la vie en général, quand je serrais quelqu'un dans mes bras, j'y allais complètement.
C'est ce qui me plaisait, je crois : lors des "bons" câlins (car il y avait des bons et des mauvais, j'y reviendrai ensuite), la personne câlinée s'abandonnait et acceptait de recevoir cette chaleur humaine que j'essayais de donner. Un bon huggeur disait en quelque sorte : "Je suis là.". Peu importe qu'on ne se connaisse pas, quelqu'un est là. 


Rapidement, les différents types de câlins : les bons câlins, c'était les gens qui serraient fort, qui acceptaient de se laisser aller et de partager cette embrassade. Il y avaient ceux qui étaient heureux, qui transmettaient leur joie, ceux qui pensaient que les huggeurs étaient eux-même en manque de câlins et qui donnaient donc des câlins réconfortants, et pour moi les meilleurs, ceux qui me faisaient me sentir bien pendant des jours: une personne qui venaient nous voir, qui venait prendre un câlin que nous donnions avec joie; un câlin qui durait, qui durait autant que la personne en avait besoin, et quand elle repartait elle avait le sourire aux lèvres et parfois elle disait merci.
Puis les mauvais câlins : les groupes de jeunes qui se poussent mutuellement en rigolant pour voir qui oserait aller câliner un des huggeurs; les câlins du bout des doigts; les câlins intéressés (bon sang, qu'est ce qu'il y en avait) dès qu'un ou une huggeur/huggeuse était un peu canon. 


Biensûr, tout le monde n'apprécie pas le contact physique et tout le monde n'a pas forcément envie de se faire prendre dans les bras par un inconnu; et l'idée c'était quand même que nous proposions nos bras pour ceux qui les voulaient, ceux qui n'aimaient pas n'avaient pas besoin de se forcer.
Je voyais ça comme un don, un présent gratuit qui pouvait illuminer la journée de quelqu'un.
Et ça me faisait me sentir bien aussi. 
Je me souviens encore de certains câlins précis: celui avec le huggeur qui est ensuite devenu mon meilleur ami, lui et ses cheveux tellement touffus; celui avec une maman dans les jardins du Champs de Mars, qui m'a embrassée comme sa propre fille; celui à cet homme qui a duré longtemps et qui est reparti en me disait merci; celui de ma camarade huggeuse en fauteuil roulant, qui a accepté ce câlin qui durait et dont j'avais besoin, et qui m'a fait tellement de bien. J'espère avoir aussi donné des câlins dont on se souvient.


Mais j'ai arrêté. J'ai été subrepticement de plus en plus agacée par ces gens qui rigolaient, qui nous prenaient pour des fous, qui ne voyaient pas que nous brisions cette distance glacée entre inconnus qui règne dans la vie de tous les jours (et lourdement à Paris), qui ne voyaient pas que ça changeait vraiment quelque chose. Et j'ai été agacée par le groupe de huggeurs aussi. Souvent les 1 ou 2 huggeurs venus pour draguer (et qui n'accostaient que les jolies filles pour leur proposer des câlins), ou bien le groupe qui lui même ne prenait pas les câlins au sérieux et qui donnait une mauvaise image du mouvement.


J'ai grandi aussi; et je grandissais à l'époque où j'ai arrêté. Je ne sais pas si je pourrais recommencer aujourd'hui; je suis beaucoup moins naïve, cependant je pense toujours que ce n'était pas rien, ce qu'on donnait. Est-ce-que c'était une dynamique adolescente?


Il m'arrive encore quelque fois de croiser des huggeurs, et je vais presque systématiquement demander un câlin. Ca me réchauffe encore le coeur quand j'en trouve un qui me donne vraiment quelque chose; mais c'est rarement le cas. Ils ont souvent l'air de juste être en train de rigoler entre amis, et d'être très surpris de voir quelqu'un venir vers eux, plutôt que quelqu'un qui accepte qu'ils viennent vers lui. 


A suivre.

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